Confortés par des partis qui reprennent des propos et des pratiques de l’extrême droite, les groupes fascistes refont surface. Les dernières actions contre le mariage pour tous et toutes ont été l’occasion pour eux d’être mis sur le devant de la scène. Nous dénonçons la banalisation du FN et de ses idées xénophobes et racistes.
L’exclusion, le rejet de l’autre, la fermeture des frontières, la désignation de boucs émissaires, la dénonciation de l’immigration comme responsable de tous les maux sont des attitudes qui, l’histoire en témoigne, conduisent au pire. L’Etat entretient un climat délétère en organisant des expulsions massives qui participent à la stigmatisation des immigré-es et des Roms. Au contraire, il est nécessaire d’agir avec détermination contre les commandos fascistes.
Odieux et inacceptable en lui-même, le meurtre de Clément dépasse le drame individuel. Agressions contre les lesbiennes, bi-es, gays et les personnes trans, contre les immigré-es et les personnes issu-es de l’immigration, les musulman-es, actes antisémites, violences envers des militant-es antifascistes et des organisations progressistes, se sont multipliées dans toute la France comme à travers toute l’E
urope. Le mensonge, la haine, la violence, la mort, voilà ce que porte l’extrême-droite, de tout temps et en tous lieux.
Ce n’est pas une question morale ; le fascisme se nourrit des peurs face à l’avenir : 5 millions de chômeurs et chômeuses, 8 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, 3,5 millions de mal logé-es, accroissement de la précarité, conditions de travail dégradées, licenciements, fermetures d’entreprises… Face à l’explosion des inégalités et aux politiques d’austérité, il faut reconstruire l’espoir collectif en une société plus juste. La question de la répartition des richesses que nous produisons est fondamentale. L’extrême-droite est à l’opposé de ces valeurs.
Si nous ne lâcherons rien face à l’extrême droite, refusant qu’elle parade dans la rue, agresse des militants, s’attaque à des locaux syndicaux, violente des personnes pour leur seule « différence » (immigrés, homosexuels, etc.) ou diffuse ses idées xénophobes, homophobes et autoritaires, nous ne lâcherons rien non plus sur le terrain social !
Certes nous sommes antifascistes et antiracistes pour des questions de valeurs et d’éthique. Mais s’arrêter à cette position ne nous satisfait pas. Car notre lutte contre l’extrême droite se fonde sur un projet de société radicalement antagoniste.
Anticapitalistes ! Parce que nous pensons qu’au cœur des drames sociaux, économiques, écologiques et humains qui sévissent aujourd’hui, se trouve la division de la société en classes sociales. D’un côté ceux qui possèdent, dirigent et optimisent leurs profits ; de l’autre ceux qui sont soumis au chantage à l’emploi, subissent la dictature de la productivité, doivent obéir à leur hiérarchie et sont privés de toute capacité de décision réelle. Ce ne sont pas l’Union européenne, le Qatar, la Chine ou la « finance » qu’il faut combattre, ni même le « grand capital et la mondialisation ». Ce ne sont que des leurres, des paravents pour éviter une remise en cause du capitalisme lui-même. La lutte des classes existe, et nous devons la mener, et contester la cause première des crises économiques et sociales : le fait qu’une minorité possède les moyens de production et d’échange, décide de leur usage, de nos besoins et de ce que nous devons accepter de faire pour satisfaire à leur unique but, conserver, voire augmenter, leur profit ! La « financiarisation » ou à la « mondialisation » de l’économie ne sont que les conséquences actuelles de cette logique. Attaquons-nous donc au fond, le capitalisme lui-même, et non à ses formes.
Autogestionnaires ! Parce que nous pensons que déléguer son pouvoir de décision à des leaders, des partis politiques ou des experts-spécialistes, c’est déjà accepter que d’autres gèrent nos vies sans nous demander notre avis et sans que le moindre contrôle réel puisse exister. Les projets sociaux-démocrates comme communistes autoritaires ont échoué d’avoir sacralisé l’État, la représentation politique et les « avant-garde éclairées ». L’extrême droite ne sait que réclamer un renforcement de l’Etat, de la hiérarchie et de l’autorité. Plutôt que de continuer à chercher qui sera notre meilleur représentant, le plus « compétent » ou le « moins pourri », prenons nos affaires en main, reprenons le contrôle de nos vies. La démocratie, oui, mais directe. Des mandatés, oui, mais révocables. Des syndicats, oui, mais autogérés ! Un projet certes exigeant, mais qui est la seule alternative pour éviter « trahisons », « non-respect des promesses » et autres « affaires de corruption » qui font le jeu de l’extrême droite.
Internationalistes ! Parce que nous pensons que les références à la « patrie », au « protectionnisme économique », à « l’union nationale » ou au « contrôle de l’immigration » ne sont que des reculs idéologiques pour gagner des voix et flatter les bas instincts des électeurs influencés par le discours volontairement simpliste de l’extrême droite. Parler de patrie, c’est faire croire que, parce que l’on est né français, on a les mêmes intérêts que l’on soit patron ou salarié. Parler de contrôle de l’immigration, c’est nier les responsabilités néocoloniales de l’État français et des entreprises françaises dans l’appauvrissement volontaire et la destruction des systèmes sociaux des pays dits « du Tiers-Monde » : pillage des ressources naturelles (pétrole, uranium, bois, cacao, etc.), mais aussi privatisations des services publics, imposition d’une agriculture intensive contre les cultures vivrière et d’autosubsistance, accords de soutien militaire et « policier » (rappelons-nous la Tunisie de Ben Ali, par ailleurs membre de l’internationale des partis socialistes…), etc. Si Areva (entreprise bien française…) arrêtait de détruire des régions entières du Mali ou du Niger pour récupérer l’uranium nécessaire à l’énergie nucléaire française, si Bouygues, Bolloré et consorts arrêtaient de soutenir les dictatures des pays ouest-africains pour défendre leurs parts de marché, les habitants de ces pays n’auraient sûrement pas la nécessité de venir chercher en France de quoi survivre en abandonnant toute leur vie… C’est aussi faire croire que le chômage viendrait des immigrés et non pas des licenciements… Or ce sont bien les directions des entreprises qui virent pour accroître leurs profits, et l’État qui, sous prétexte d’économie, supprime des milliers de postes de fonctionnaires et détruit les services publics. Bref, parler de patrie ou de contrôle de l’immigration c’est encore une fois accepter de céder à l’extrême droite qui ne cherche qu’à nier la lutte des classes pour la remplacer par la lutte entre les peuples…
L’extrême droite se nourrit des contre-réformes des gouvernements successifs face au capitalisme en crise ; elle se délecte des renoncements idéologiques politiques et syndicaux ; elle prospère sur le terrain du recours aux faux-semblants de patrie, d’État protecteur et de personnalisation du pouvoir ; elle grossit des affaires de corruption à répétition entre détenteurs du pouvoir politique ou économique ; elle s’extasie de la destruction des systèmes de solidarité comme du repli sur soi et de la peur qui s’ensuivent.
Alors, si nous voulons réellement renvoyer l’extrême droite dans les poubelles de l’histoire, nous devons reprendre l’offensive sociale, renforcer l’auto-organisation des travailleurs, reconstruire des lieux d’entraide et refuser de déléguer notre pouvoir de décision à qui que ce soit. L’extrême droite hait les syndicats, les grèves et les victoires sociales parce qu’elle ne vit que de la misère, de la peur et de la victimisation. Nous ne la vaincrons qu’en renversant enfin le rapport de force et en conquérant enfin de nouveaux droits sociaux. Ce sera l’un des enjeux fondamentaux de la lutte qui s’annonce contre les nouvelles contre-réformes des retraites et de l’assurance chômage. Céder une fois de plus sera la porte ouverte vers la résignation, l’individualisme, la rancœur, la haine et le refuge vers « celui ou celle qui gueule le plus fort ». Il n’appartient qu’à nous de tout faire pour l’empêcher…
Plus que jamais, sur le terrain, dans les quartiers, dans les entreprises, nous lutterons sur le plan syndical, social et humain, contre les idées de l’extrême droite et de ses alliés.
La CNT appelle l’ensemble des travailleuses et des travailleurs à la plus grande vigilance et à réagir à chaque situation où s’expriment le racisme, l’homophobie, le sexisme, et l’autoritarisme. Sur nos lieux de travail et dans nos quartiers, ne laissons pas le venin de l’extrême-droite se répandre.